keep calm & study hard

C’était une belle matinée d’été. Il ne devait pas être plus de huit heure et, une chaleur étouffante avait déjà prit place dans les hautes allées lambrissées de la bibliothèque, la faute à une architecture archaïque qui semblait tout ignorer des systèmes de climatisation. Rares étaient les courageux qui, ayant trouvé la motivation nécessaire pour se lever un samedi matin, erraient déjà, perdus entre les rayonnages, en quête de réponses à leurs questions. Assis à l’une des grandes tables d’étude, le professeur Vertige feuilletait non sans une exquise nonchalance un épais volume au contenu tout aussi ennuyeux que la couverture, une feuille presque vierge posée sous son coude, attendant ses notes. Il n’y avait aucun mystère quant à la raison de sa présence ici. Si Léon s’évertuait à surveiller les colles chaque samedi matin, c’était bien pour se faire pardonner de ses propres écarts de conduite auprès du reste du corps enseignant, et seul dieu savait la quantité de choses que l’homme avait encore à cacher.

Ses pieds prirent tout naturellement place sur la chaise située à sa gauche. Quittant des yeux l’ouvrage qu’il tenait entre ses mains, il laissa son esprit vagabonder ; aller à des préoccupations plus triviales que celles de rédiger une prochaine correction d’interrogation surprise pour ses élèves. Il faisait très beau dehors, et, sans doute bon, à en juger par la brise légère qui agitait de temps à autre le feuillage des arbres environnants. La lourdeur du climat avait beau abrutir Léon, celui-ci ne perdait pas une miette de ce qui se passait autour de lui : de la mouche qui volait avec frénésie et grand renfort de bruit au plafond jusqu’aux jeunes demi-dieux pour moitié endormis dont le nez avait tendance à piquer par moment. Lui non plus n’était pas parfaitement éveillé, et pour cause, il avait dû passer une bonne partie de la nuit à explorer les fonctionnalités de son médaillon d’Errantia. Il lui suffisait de prononcer ce nom pour qu’un air de béatitude enfantine se peigne sur ses traits, cela avait quelque chose d’assez ironique.

Il reporta son attention sur le livre qu’il avait entreprit de lire, avec la résignation du condamné à mort. Le médaillon attendrait, il avait d’autres chats à fouetter dans l’immédiat. Un coup d’œil à sa montre lui apprit que les collés du jour devaient être en retard au moment même ou des bruits de pas vifs et décidés semblaient se rapprocher bruyamment.

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Léon terminait de lire avec beaucoup d’attention le volume qu’il avait entre les mains. Il avait la sensation désagréable qu’il ne pourrait jamais décoller ses doigts de la couverture de cuir tant ceci s’enfonçaient dans la matière. Il vint à bout de l’ouvrage, et le posa dans un grand bruit sourd sur la table à laquelle il s’était assis. Il poussa un grand soupir plein de lassitude. Il avait tant de choses à faire aujourd’hui. C’est sur ces pensées pleines de morosités qu’il eut la curieuse sensation d’une pression légère le long de son bras, la peau se hérissant d’une chair de poule équivoque, le tout accompagné d’un « Vous savez que vous êtes vraiment mignon ? » à peine murmuré. Voilà qui lui rappelait des souvenirs. Avec toute l’insolence dont il était encore capable, il tourna avec une lenteur mesurée la tête vers son interlocutrice, lui adressant son sourire le plus narquois. « Oui, je sais. On me le dit souvent. » Ses yeux avaient quelque chose de rieurs dans la forme qu’ils avaient prit. La propriétaire d’un doigt insidieux qui remontait non sans une certaine langueur le long de son bras ne devait pas être sortie de l’adolescence. Il haussa un sourcil moqueur, pinçant les lèvres dans une tentative pour retrouver son sérieux et non exploser d’un rire tonitruant. Il parvint à se retenir au prix de couteux efforts. « Je suppose que vous êtes Elysa Stone ? » Si il y avait bien une chose que Léon avait toujours apprécié, c’était l’audace, et si la tentative de la jeune fille pour s’épargner une retenue avait été plutôt convaincante, elle n’avait pas choisi la bonne personne pour en faire la démonstration. « Vous pouvez vous asseoir. » Il sorti le dossier des collés du jour, qu’il gardait dans une chemise cartonnée, à portée de main, et entreprit de jeter un œil aux accusations portées contre la demoiselle et à la peine qu’elle devait purger. « Et bien… et bien… » Fit-il d’une voie voulue neutre, trahie par ses yeux qui s’écarquillaient un peu plus à chaque saut de ligne.

Il était sûr d’avoir déjà cette fille là. Peut-être dans son cours, mais il y avait certains visages qui, l’on ne savait pourquoi, restaient en mémoire. Avait-elle déjà été collée avant ? Ou lui avait-elle causé des ennuis ? Il n’en savait rien, et il fut étonné de sa propre ignorance. « Vous êtes dans mon cours vous ? » Lui demanda t-il avec une mine déconfite. Il ne voulait pas avoir à subir ce que la jeune fille avait fait à son collègue, professeur en stratégie de combat.